Le 1er février, AXCEL Partners a eu le plaisir de recevoir Anne Rigail, Directrice générale Air France pour un échange privilégié sur la thématique de la transition énergétique « Air France suit sa trajectoire de décarbonation » :

30%, c’est l’objectif de réduction d’émissions carbone par passager-kilomètre à horizon 2030 (vs 2019) annoncé par Air France, et validé par la Science Best Targets initiative (SBTi*). Un chiffre ambitieux qui implique des changements en profondeur pour la compagnie aérienne. C’est ce qu’est venue présenter Anne Rigail, lors des Rencontres du Management organisées par AXCEL Partners.

« La décarbonation est l’enjeu existentiel pour les compagnies aériennes, et le trafic aérien en général. »

Anne Rigail annonce la couleur et donne le ton avec quelques chiffres : 2,6%, la part d’émissions mondiales imputables au transport aérien** ; + 42%, la croissance des émissions du secteur entre 2005 et 2019, des émissions pourtant à la baisse (-6%) chez Air France sur cette même période, malgré une augmentation de l’activité de 30%.

Quels sont les leviers d’action pour Air France et les freins que la société rencontre aujourd’hui dans cette trajectoire de décarbonation ?

Dès 2019, le choix a été fait de renouveler la flotte. « C’est Ben Smith qui a donné l’impulsion en 2018 au niveau du groupe, pour aller vers des appareils moins gourmands en kérosène. » D’ici 2025, la compagnie aura reçu 41 A350 et 60 A220, des appareils dont les émissions sont réduites respectivement de -25% et -20%. Au global, les avions de nouvelle génération représenteront 45% de la flotte en 2025. Constructeurs et motoristes sont donc parties prenantes dans cette trajectoire de décarbonation.

Autre levier de poids et d’avenir, les carburants d’aviation durables : les biocarburants de 2e génération et carburants de synthèse. S’ils ne représentent que 1,2% de la consommation chez Air France en 2023, cette part va inéluctablement et heureusement progresser rapidement sous l’influence des régulations européennes. Bruxelles impose un objectif de 2% en 2025 et de 6% en 2030 pour tous les vols au départ d’Europe.

Sur cette question des carburants d’aviation durables, deux obstacles de taille : la production et le coût.  Alors que les Etats-Unis investissent massivement dans ces carburants nouvelle génération, notamment grâce aux subventions de l’administration Biden, les filières françaises et européennes tardent à se structurer. Les énergéticiens ont leur rôle à jouer pour permettre aux compagnies aériennes de poursuivre leurs efforts.

L’autre difficulté est bien-sûr le surcoût engendré par l’utilisation de ces carburants durables, surcoût estimé à plusieurs milliards d’euros pour le groupe Air France-KLM à horizon 2030. Il s’agit donc pour la compagnie de répartir les coûts entre les clients entreprises, qui, en assumant une partie des surcoûts, s’inscrivent eux-mêmes dans une démarche de réduction des émissions, et les particuliers qui ne comprennent pas toujours les écarts de prix liés à cette “contribution carburant aviation durable” qu’Air France a souhaité rendre visible dans le prix du billet, en toute transparence.

A cet égard, les politiques et institutions internationales doivent travailler à un alignement des réglementations pour ne pas pénaliser les compagnies européennes, face aux compagnies frontalières notamment. En effet, ces dernières ne sont actuellement contraintes que sur le vieux continent, quand les compagnies européennes doivent répondre de leurs engagements sur la totalité de leur vol, quelle que soit la destination. Que ce soit pour une plus juste compétition ou pour une prise en compte globale de cet objectif de décarbonation, l’harmonisation des règlementations au niveau mondial est sans doute l’un des enjeux majeurs pour une compagnie comme Air France.

Merci Anne Rigail d’être venu partager votre vision sur ce sujet qui touche aujourd’hui l’avenir de notre planète.


* Organisme indépendant qui accompagne les entreprises dans leur réduction d’émissions carbone.

** Chiffre qui ne prend pas en compte l’impact de la condensation, les traînées blanches, sur l’effet de serre