L’évolution vers des Modèles Economiques plus modernes est une opportunité que les entreprises ne doivent pas manquer.

Giandomenico Rivetti, Lars Dittmann

Cette série d’articles est une introduction à la transformation numérique. Nous allons parcourir le chemin qui amène à devenir plus focalisé sur le client à travers l’utilisation des technologies numériques.

A présent, nous commençons par le modèle économique et la comparaison entre les modèles traditionnels et la mise en place de modèles qualifiés de plus modernes. Classiquement, les producteurs proposent leurs produits et services avec l’intention de satisfaire les besoins des clients alors que dans des modèles plus dynamiques/modernes, le point de départ de structuration de l’offre est le besoin client.

Maintenant, comment cela se traduit-il concrètement ? Voyons cela ensemble.

Le Modèle Economique Traditionnel

Quand nous parlons de modèles économiques classiques, il s’agit de modèles rodés qui ont fait le succès et la prospérité d’entrepreneurs, d’actionnaires et des populations pendant plusieurs siècles.

Si nous revenons à ces producteurs de biens industriels et de consommation, comme aux fournisseurs de services standards qui rendent notre vie plus facile, ces entreprises sont fortement orientées sur la valeur : créer de la valeur, fournir de la valeur, capter la valeur et la défendre face à la concurrence.

L’emphase mise sur des structures centralisées, fortement hiérarchisées et l’excellence opérationnelle ont fait la force de ces sociétés. Lorsque le coût marginal pour produire reste élevé, la focalisation sur l’EBITA (excédent brut d’exploitation) comme principal indicateur (KPI) pour gérer le court terme est pertinente. Pour ces entreprises, la numérisation offre une opportunité d’échapper à la course à l’échalotte qui consiste à produire la valeur donnée à un coût de plus en plus réduit. En prenant cela en considération, les besoins des clients existants peuvent être satisfaits à travers les technologies numériques. Ces entreprises peuvent alors initialiser leur transformation numérique.

Voyons comment nous pouvons nous inspirer de modèles économiques plus modernes.

Le Modèle Economique Moderne

Les Modèles Economique Moderne ne se présentent pas comme un format uniforme. Par contre, ce qu’ils partagent c’est une implémentation digitale intégrée en natif au modèle qui tend à diminuer jusqu’à supprimer le coût incrémental de production.

Ils utilisent les technologies de l’information et des télécommunications, l’intelligence artificielle, des gisements de données et les outils pour les exploiter. Ils contribuent à l’atteinte de l’objectif via ces technologies.

Certains de ces modèles projettent une culture centrée sur le client qui est pris en charge dans une véritable bulle numérique.

Pour illustrer plus concrètement le modèle économique modern par des exemples et différents types de recours au numérique, faisons la distinction entre les catégories : usage, collaboration et pur digital.

Le Modèle d’Usage – Connaître parfaitement son client et le servir au mieux

Le modèle d’usage est le plus proche du modèle économique traditionnel. La différence majeure est l’utilisation étendue des technologies de l’information et des télécommunications dans la chaîne de valeur. Des exemples typiques sont des sociétés comme Ikea et Zara dans le B2C, ou comme Hilti dans le B2B. La visibilité donnée sur la chaîne d’approvisionnement (Supply Chain) dans le système de logistique de Zara a été décrit dans plusieurs études de cas (https://www.hbs.edu/faculty/Pages/item.aspx?num=29709 ).

Cela permet à l’entreprise de changer ses collections plus vite et de s’adapter aux retours des clients. Les données collectées sur les points de vente alimentent les designers pour modifier et améliorer les produits. De nombreux distributeurs ont copié l’idée et recollé au leader. Les caractéristiques du modèle viennent de l’excellente connaissance des clients et de la maîtrise de la logistique comme facteur clé de succès, associé à une politique de coûts serrés et toujours en donnant au client la sensation que tous ses besoins sont satisfaits.

Le Modèle Collaboratif – Le Partenariat comme alternative aux fusions/acquisitions (M&A)

Quand nous parlons de modèles collaboratifs, il s’agit de la mise en place de plateformes. Les clients perçoivent la plateforme comme la solution pour satisfaire leurs besoins. Les produits et services proposés sont cocréés, ils ne sont pas produits par une seule entité. Des exemples typiques sont Uber, Airbnb, mais également du côté de la Chine, la très active plateforme Alibaba qui détient le grand nombre d’utilisateur au monde qui en vient à rendre nerveux le pouvoir politique.

Les plateformes ont tendance à former des monopoles au fur et à mesure de l’accroissement du nombre de clients et des bénéfices générés par utilisateur. Dans ce domaine, le leader raffle la mise. D’un autre côté, la plateforme délègue une partie de la création de valeur.

Dans le cas de Uber et de Airbnb, de nombreux petits entrepreneurs paient des royalties pour pouvoir offrir leurs services sur la plateforme. Même les acteurs historiques ne possèdent pas une palette d’actifs suffisante et font de la croissance à travers des partenariats. En regard de cette situation, les entreprises industrielles disposent de leurs propres usines, leurs machines et de nombreux actifs y compris des locaux et des hubs logistiques.

Dans ce cas de figure, la croissance par fusion/acquisition semble la plus naturelle pour accroître les parts de marché. La question est de savoir ce qui doit être retenu du modèle collaboratif ?

Le Modèle Pur Acteur Digital – les collaborateurs comme les clients sont au centre du modèle

Dans ce modèle la culture de centrage sur le client est poussée à l’extrême. La chaîne de valeur est portée par le numérique, l’interface client est numérique et la plupart des processus et fonctionnalités le sont également.

A titre d’exemples, Google et Facebook utilisent des algorithmes basés sur de l’Intelligence Artificielle qui rentrent dans les mécanismes de prises de décision des clients. Ces algorithmes conduisent à des decisions potentiellement meilleures que celles prises par les individus. Pour illustrer : le choix du chemin à prendre pour visiter un ami ou de la musique à écouter.

De nouveau, la question à se poser est : qu’est-ce qu’il faut retenir du modèle de pur acteur du digital ? Comme les besoins de clients évoluent en permanence, le modèle de « pure player » peut s’adapter à ces changements très rapidement. La rupture est vue comme un standard et impacte la culture de la société. Les entreprises industrielles classiques peuvent s’enrichir de cette évolution permanente pour l’intégrer dans leur propre culture d’entreprise.

Conclusion

La plupart des entreprises travaillent suivant un modèle économique traditionnel. Maintenant, avec la montée en puissance du numérique, les temps changent et la pression du marché pour évoluer se fait plus forte. Aussi, notre recommandation est de commencer à regarder plus en détail votre modèle économique et de voir s’il permet ou non, même à la marge, de passer à une nouvelle étape.

L’utilisation progressive de technologies digitales dans votre chaîne de valeur est également une manière de démarrer. Une approche complémentaire est de regarder les plateformes existantes dans votre secteur d’activité et de comprendre leur apport. Dans nos prochains articles, nous verrons comment définir la transformation numérique, en plaçant le client au centre. Mettre le client au centre cette transformation, comme des autres, est un facteur clé de votre réussite.

En complément, les vidéos suivantes développent des exemples et cas d’application.

 

Cas de transformations réussies dans le B2B vers des modèles économiques modernes.

Voice of the expert : Laurent Gervais

La FNAC, l’un des principaux détaillants omnicanaux européens d’appareils électroménagers, d’électronique et de produits de divertissement, est un exemple de réussite pour passer à un modèle commercial moderne. Même s’il s’agit principalement d’activité en B2C, la manière dont un changement clair de modèle stratégique a été introduit est une référence.

La FNAC développait son activité e-commerce FNAC.com comme canal de vente complémentaire aux magasins physiques existants, voire les mettait en concurrence (par exemple, les adhérents FNAC via le programme de fidélité n’étaient pas reconnus sur FNAC.com, les prix étaient à peine le même mais pas la promotion, …).
Ainsi, face à la concurrence d’Amazon d’une part, n’étant qu’un adepte du e-commerce, et la conversion des produits (CD, DVD, livres) vers une offre entièrement digitale avec l’érosion associée du canal physique, le top management décide de fusionner totalement les deux organisations et entreprises. Un nouveau modèle dans lequel le digital est aussi en magasin a été ainsi construit (avec le click & collect, digitalisation du parcours client, rendre les vendeurs plus actifs dans la clôture des transactions/paiement, …).

Autre exemple, plus spécifique à l’environnement B2B, Orange, opérateur mondial de télécommunications a pu grâce à une démarche de digitalisation autour de sa solution CRM intégrer largement les canaux de vente indirects dans son business model. Il a pu également adresser de manière plus efficace le milieu-bas de marché européen en diminuant le coût de vente et ainsi challenger le leader.

Un autre exemple est Amazon qui a développé son offre cloud AMS à partir des capacités numériques construites pour leur plate-forme de commerce électronique et ainsi entrer sur le marché B2B en concurrence directe avec Google et Microsoft. Aujourd’hui, la marge de cette nouvelle activité soutient les bénéfices globaux de l’entreprise.

Le dernier exemple est John Deere, spécialisé dans la fabrication de matériel agricole et en particulier de tracteurs, qui a développé les technologies IoT pour leurs produits et capte sur le terrain des données météorologiques avec une couverture exceptionnelle. Il tire désormais des revenus de cette toute nouvelle activité de revente de données à tiers, les avantages proviennent donc des services et pas seulement des ventes de matériel.